Nous venons tout juste de terminer une semaine de vélo assez difficile entre Khartoum, au Soudan, et Gondar, en Éthiopie. Difficile à cause de la chaleur, des routes, de la fatigue, de la diarrhée… comme nous l’a si bien dit la responsable du groupe, Each day brings a new challenge. Ceci dit, chaque jour a aussi amené de très beaux paysages et d’agréables expériences…
Nous sommes partis de Khartoum le 4 février vers 7h15, et nous avons goûté à un fort vent de face (probablement autour de 40-50 km/h) pendant les 80 km avant le dîner. En après-midi, nous roulions dans une autre direction et le vent était rendu de côté, ce qui est beaucoup moins forçant. Il commençait à faire chaud, par contre, et ça a continué le lendemain : nous avons fait environ la moitié des 155 km de la journée sous une température d’environ 45°C au soleil.
Les trois jours suivants ont sans contredit été les plus difficiles pour mon vélo et moi. Les distances étaient un peu plus courtes – autour de 90 km par jour – mais nous devions rouler sur des chemins de terre assez maganés par moment, avec de fortes ondulations (motifs de roues de tracteur dans le sol qu’il était impossible d’éviter). Mes pneus Schwalbe Marathon Supreme ont très bien résisté et je n’ai eu aucune crevaison, contrairement à certains qui en ont eu près d’une dizaine, mais ce n’était pas l’idéal de rouler sur ces chemins avec des pneus de 35 mm de large – mes plus gros – et sans suspension… Mon corps a subi beaucoup de vibrations, et mon vélo aussi. Bilan des trois jours : une selle brisée (et irréparable ici; elle est sortie de son armature de métal) – je l’ai réparée avec des tyraps (attaches de nylon) et remplacée par ma selle de rechange à la fin de la journée – , une pédale qui a perdu un morceau et avec laquelle je ne peux plus clipper mon soulier, un cyclomètre qui est sorti de son support, un frein à disque qui a dû être réajusté, un multitool qui a perdu un morceau… il était temps que ça finisse!
Le sixième jour, nous étions de retour sur des routes pavées – alléluia! La route était agréable, et nous avons traversé la frontière entre le Soudan et l’Éthiopie sur l’heure du midi. Nous avons dû attendre un peu plus d’une heure dans le bureau des douanes éthiopiennes, pendant qu’ils retranscrivaient manuellement les informations de nos passeports dans un gros registre, mais nous avons quand même pu arriver au camp relativement tôt. Il fallait bien se reposer un peu, car les deux journées qui s’en venaient allaient comporter beaucoup de côtes…
Je me suis réveillé le septième jour avec la nausée et la diarrhée – comme plusieurs personnes dans le groupe, c’était possiblement notre cadeau de bienvenue en Éthiopie – mais j’ai réussi à rouler quand même, en y allant tranquillement, surtout dans les montées (environ 1200 m de montées cette journée-là). Le lendemain, je me sentais mieux – heureusement – et j’ai profité de très beaux paysages et d’une belle route avec un peu plus de 2500 m de montées. Nous sommes maintenant à 2300 m d’altitude, et la température est beaucoup plus modérée qu’au Soudan.
Premières impressions sur l’Éthiopie
L’Éthiopie est un pays pauvre (PIB par habitant de 360 $) et très populeux (88 millions d’habitants; taux de fécondité de 6,07 enfants par femme), mais qui jouit de très beaux paysages. La nourriture est excellente, aussi, à en juger par l’ingéra, les tibs (morceaux de viande cuits dans du beurre clarifié) et le jus de mangue et avocat que j’ai consommés à date. Une source majeure de frustration, par contre, provient du nombre très élevé d’enfants (46% de la population a moins de 14 ans, comparativement à 16% au Canada) qui ne semblent avoir rien de mieux à faire que d’embêter les cyclistes qui passent par leur village : on se fait lancer des roches, frapper par des bâtons, une membre du groupe s’est fait frapper avec un fouet utilisé pour fouetter un âne… Certaines personnes (dont moi) se sont aussi fait voler des bouteilles d’eau, et nous avons tous été sollicités plusieurs centaines de fois par jour par de jeunes éthiopiens qui criaient « Money! Money! » alors que nous passions devant eux à vélo. Ça fait un peu réfléchir sur l’impression qu’ils ont des Blancs suite à l’aide internationale qu’on leur fournit…
Il nous reste 23 jours en Éthiopie, et je sens que ça va être difficile par moments, mais nous devrions être récompensés par de superbes paysages si je me fie à ce que nous avons vu à date.
En vrac
- Dans le Sud du Soudan, c’était parfois difficile d’arrêter dans certains villages pour acheter une boisson gazeuse sans se faire entourer par des dizaines d’enfants intrigués par la couleur étrange de notre peau. À un moment donné, je suis arrivé dans un village et j’ai vu une foule d’environ 100 enfants qui semblaient entourer quelqu’un. J’ai levé la tête et j’ai vu Bastian, un néerlandais du groupe qui mesure 6 pieds 7 pouces, et je me suis dit que sa grandeur devait être l’attraction. Mais non, quand il est parti, les mêmes enfants se sont massés autour de moi et d’une autre cycliste qui venait d’arriver… la police est intervenue pour disperser la foule (« Yalla! Yalla! »), mais deux minutes après, la foule s’était reformée! Les enfants n’étaient pas agressants, mais c’est quand même fou de voir à quel point on peut être une attraction.
- À mon premier soir à Gondar, je suis allé souper dans un resto Éthiopien typique avec quelques membres du groupe, dont deux sont d’origine éthiopienne. Nous avons mangé un très bon souper, avec jus frais pressé, pour moins de 3$ par personne. Une employée du restaurant a aussi préparé du café selon la manière traditionnelle éthiopienne devant nous, ce qui implique qu’elle a fait rôtir les grains de café juste avant de le préparer. La cérémonie du café a duré une bonne heure.
En chiffres
Nombre de jours : 8
Kilomètres parcourus : 853
Calories brûlées (estimation) : 23 422
Temps passé sur le vélo : 45 h 24
Distance totale parcourue depuis le début : 2 792 km
En photos
La section en photos est en grève cette semaine, suite à la disparition mystérieuse de mon appareil photo dans les 48 dernières heures. Soit que je suis vraiment aveugle et que je ne regarde pas au bon endroit (même si j’ai cherché pas mal partout), soit que je me le suis fait voler, ce qui est malheureusement très possible en Éthiopie si on se fie à l’histoire récente du Tour d’Afrique. C’est dommage, car j’avais pris plusieurs photos dans les trois dernières semaines – dont certaines bonnes! – mais c’est la vie…
Une cycliste du groupe m’a prêté son deuxième appareil photo pour me dépanner, alors j’ai pu recommencer à en prendre hier, et je vais essayer de m’en acheter un dans les prochaines semaines si je trouve de quoi de potable.
Je suppose que tu n’avais pas transféré le contenu de la carte mémoire de ton appareil photo sur ton disque dur après chaque journée de ton voyage ?
Tu as tout pigé… on ne pense pas toujours à faire ça malheureusement, et même quand on y pense, on n’a pas toujours l’énergie. À moins que je retrouve l’appareil photo, mes photos des trois dernières semaines sont donc toutes perdues.
Pier-Luc veut savoir comment Pierre-Luc trouve sa selle de spare.
Elle est bien confortable finalement. Ça a pris un peu de temps trouver une position confortable, mais je pense que j’y suis arrivé, et la selle était confortable pour les fesses dès le premier jour (pas eu besoin de la « casser » comme certaines personnes doivent faire avec leur selle Brooks).
Comme on dit aux Pays Bas : Schnoutten!!! 😉 tu as peut-etre perdu ton appareil mais dis-toi qu’il te reste des collegues de velo…qui ont vu les memes paysages alors fais-toi une alliance photo avec deux-trois personnes…. Nous, on veut notre recit photo du voyage a ton retour, on a pris une semaine de vacance en mai juste pour ca…
En effet, c’est l’avantage d’être avec un groupe… je vais pouvoir partager mes photos avec d’autres et combler le vide que j’ai pour le Sud de l’Égypte et le Soudan. Il y a bien quelques clichés que je suis le seul à avoir pris, mais sur l’ensemble du voyage, ça ne devrait pas être une trop grosse proportion!
Ça va me faire plaisir de vous faire un récit photo à mon retour! 🙂